Les grandes surfaces nous aident-elles avec leur offre de produits et leurs pratiques commerciales à mieux manger et à avoir une consommation plus responsable ? C’est à cette question que l’UFC Que Choisir a essayé de répondre avec une vaste enquête qui a mobilisé les équipes de l‘Observatoire de la Consommation à la Fédération et les associations locales dont la nôtre.

Les 9 plus grandes enseignes (ALDI, AUCHAN, CARREFOUR, CASINO, INTERMARCHE, LECLERC, LIDL, MONOPRIX, U) ont été jugées sur cinq grandes thématiques (origine des produits, emballages et vrac, viande, équilibre nutritionnel, produits bio).

La méthodologie de l’enquête a été la suivante :

  • 1300 magasins ont été visités par les équipes d’enquêteurs des associations locales. Celle de notre AL a visité 50 magasins (cf. ci-dessous). Données collectées : offre de produits bios, origine des produits, emballages proposés pour emporter les produits, offre de produits en vrac, etc.
  • Les équipes de la Fédération ont analysé les catalogues des enseignes et leurs sites d’achat en ligne pour collecter certaines données (part de produits avec un Nutriscore affiché, part occupée par la viande...). Concernant l’équilibre nutritionnel notamment et leur politique en la matière, ainsi que l’origine des produits, des questionnaires ont été envoyés à chaque enseigne auxquels la plupart a répondu sauf Aldi, Lidl et Intermarché.

Les résultats plus détaillés de l’enquête ont été publiés dans le n° 636 (juin 2024) de Que Choisir et sur quechoisir.org (article réservé aux abonnés). Voici les principales conclusions pour les cinq thématiques résumées sous forme d’un code couleur pour chaque enseigne : rouge (très insuffisant), orange (mauvais) et jaune (passable) car malheureusement aucune enseigne n’a mérité du vert (bon) pour aucun critère !

  • Emballages plastiques et produits en vrac.

Une seule enseigne (Leclerc) est passable ! La vente en vrac est pour l’instant peu développée (et insignifiante chez Aldi et Lidl) et le recours à des emballages plastiques (même biodégradables qui peuvent contaminer les sols) trop fréquent. Seul point un peu positif : les produits en vrac n’étaient pas plus chers que leurs équivalents emballés… ce qui est quand même logique !

Pour des résultats plus détaillés sur ce sujet vous pouvez consulter cet article sur quechoisir.org.

  • Equilibre nutritionnel : la malbouffe persiste !

Toutes les enseignes écopent d’un « insuffisant » ou d’un « mauvais ». Pourquoi ? Leurs catalogues analysés font une part trop importante aux produits déséquilibrés ou à l’alcool au détriment des fruits et légumes. De plus Aldi, Intermarché et Lidl n’ont pas daigné répondre aux questions posées. Seul point un peu positif : la présence du Nutriscore sur les produits MDD (Marques de distributeurs des enseignes). Et s’il fallait choisir un « moins mauvais » parmi les « mauvais » ce serait Leclerc pour son offre en fruits et légumes, ses prix et son usage du Nutriscore.

  • Viande : toujours largement promue !

Alors que nous devrions être incités à moins consommer de viande et charcuterie, un produit sur huit mis en avant dans les catalogues en fait partie. Et même pour des produits comme les pizzas, celles avec de la viande et de la charcuterie sont trop mises en avant,  Lidl et Monoprix sortent du lot comme « moins mauvais ».

  • Produits bio : trop peu ou trop chers !

Nous nous sommes intéressés à deux critères : la disponibilité des produits et leurs prix. Concernant les prix, Casino et Monoprix sortent (en mal !) du lot avec des prix en bio près de 100% plus chers qu’en non-bio, y compris pour leurs marques de distributeurs. Quant à la disponibilité des produits, donc à l’offre en bio, Aldi, Lidl et de nouveau Casino sont dans le rouge ! In fine, seules deux enseignes ressortent comme « moins mauvais » : Carrefour et Leclerc, ce qui peut, pour partie, être dû pour l’offre à la plus grande surface des magasins. Ces deux enseignes se distinguent aussi avec des prix en bio moins déraisonnables.

  • Origine France : pas assez privilégiée !

Résultat très disparate entre Aldi qui ne proposait, à la différence des autres enseignes, que du raisin blanc d’origine étrangère ainsi que pour les courgettes et champignons pour un tiers des magasins. Autre critère : l’origine de la viande, du lait et des œufs… produits pour lesquels Aldi et Intermarché ne nous ont fourni aucune donnée. Ressortent en « moins mauvais » U et Monoprix qui, au vu des relevés et des données fournies, font un effort pour mettre en vente des produits d’origine France.

Comme conclusions de cette étude nous retiendrons :

  • Que toutes les enseignes ont de gros progrès à faire pour aider leurs clients à bénéficier d’une offre leur permettant de consommer des produits sains, bios, à un juste prix, d’origine France sans être obligés de les emporter avec des emballages plastiques.
  • Que, tous critères confondus, trois enseignes sont un petit plus vertueuses ou plutôt « moins mauvaises, Leclerc, Auchan et U et que les deux « hard-discounters, Lidl et surtout Aldi, sont en queue de peloton sur la quasi-totalité des critères.

Intéressons-nous maintenant aux résultats de l’enquête dans le périmètre de l’AL c’est-à-dire l’Est de l’Hérault.

Résultats locaux de l’enquête.

Pour compléter les données recueillies par la Fédération, il était demandé aux AL d’effectuer une enquête de terrain auprès des magasins des 9 enseignes. Pour notre AL cela représentait 70 magasins dans l’est de l’Hérault (Métropole de Montpellier, Lunellois, Ganges, Lodévois, Clermontais, Coeur d’Hérault). 17 bénévoles de l’AL ont visité 50 de ces magasins.

Il leur était demandé de collecter entre le 23 septembre et le 7 octobre 2023 les données suivantes :

  • Pour cinq fruits et légumes (courgettes, champignons de Paris, raisins blancs, kiwis, poires) leur disponibilité en rayon en bio et non bio, leur origine (locale, française ou étrangère), leur prix et les sachets disponibles (plastiques, papiers, autres) pour les emporter.
  • La présence d’un rayon vrac, le nombre de colonnes ou bacs du rayon, la nature des sachets pour emporter les produits et pour cinq produits (amandes décortiquées, corn-flakes, coquillettes, riz basmati, lentilles vertes) leur présence en bio ou non bio et leur prix.
  • Pour 8 produits d’épicerie leur présence en produits bios.
  • Et enfin pour 35 produits d’épicerie (dont 14 bios) leur prix.

Ces données ont permis de contribuer à l’enquête nationale et localement pour chaque magasin d’établir un score coloriel sur cinq couleurs : rouge (le moins bon), marron, orange, jaune, vert (satisfaisant) pour quatre critères :

  • La disponibilité des fruits et légumes français sur les cinq recherchés. Leur nombre peut paraître limité mais au moment de l’enquête on pouvait s’attendre à les trouver dans chaque magasin (fruits et légumes de saisons).
  • La disponibilité de produits en vrac qui est un marqueur de la volonté du magasin de contribuer à une consommation plus responsable en réduisant les emballages.
  • La disponibilité de fruits et légumes bios.
  • La disponibilité de produits d’épicerie en bio. Ces deux derniers critères montrant l’intérêt du magasin de proposer une offre de produits sains significative.

Les résultats dans le tableau ci-dessous pour les 50 magasins regroupés par enseigne, recoupent les données obtenues au niveau national. Nous ne tenons pas compte du seul magasin Casino compte tenu des incertitudes pesant à l’époque sur son devenir.

  • Disponibilité des cinq fruits et légumes français. Aucun magasin ne propose les cinq. Principale raison : les kiwis sont systématiquement importés alors qu’il existe une production française au moment de l’enquête, certes insuffisante pour répondre à la demande, mais qu’on aurait dû au moins trouver dans quelques très grandes surfaces. Si on fait une moyenne par enseigne en tenant compte des différents magasins, Aldi est le plus déficient suivi de Carrefour, Lidl et U comparables puis Monoprix et Intermarché et enfin Leclerc et Auchan (ce dernier avec un seul magasin).
  • Produits en vrac. Ils sont absents ou quasiment absents chez Aldi, Lidl et Monoprix. Pour les autres enseignes les résultats sont disparates d’un magasin à l’autre avec une offre plus soutenue dans les trois Carrefour Hyper, l’Intermarché de Jacou et le Leclerc de Saint Aunes. La taille des magasins semble être un facteur explicatif mais aussi peut-être une politique commerciale des gérants.
  • Disponibilité des fruits et légumes bios. Aldi est, à nouveau, le mauvais élève ainsi, quoiqu’un peu moins, que Lidl ? Dommage car ces enseignes peuvent se distinguer avec des prix plus intéressants. Auchan et Leclerc sortent à nouveau du lot. Quant aux autres enseignes les résultats sont disparates suivant les magasins. Mais, in fine, sur les 50 magasins enquêtés seuls cinq ont une offre satisfaisante.
  • Disponibilité de produits d’épicerie bios. Les résultats sont comparables aux fruits et légumes. Une offre très faible chez Aldi et Lidl, faible chez Monoprix, moyenne chez Carrefour et U et plus conséquente chez Intermarché et Leclerc avec néanmoins des différences entre magasins d’une même enseigne.

En conclusion, tous critères confondus, on retrouve sans surprise localement les mêmes résultats qu’au niveau national :

  • Pour nous aider à manger mieux et de manière responsable la plupart des enseignes, sinon toutes, ont beaucoup de progrès à faire.
  • Il y a, néanmoins, des différences significatives entre les enseignes et au sein d’une même enseigne entre les magasins, ce qui tend à prouver que d’un magasin à l’autre, la politique commerciale de la direction peut jouer.
  • Lidl et surtout Aldi restent les mauvais élèves sur tous les critères et Auchan et Leclerc (effet de la taille des magasins ?) sont les plus vertueux ou plutôt les « moins mauvais ».